Assurabilité des mouvements populaires : pas de prise en charge pour les Gilets Jaunes blessés

Le mouvement des Gilets Jaunes qui secoue la France chaque samedi depuis le 17 novembre a provoqué de nombreux blessés parmi les manifestants. Malheureusement pour ces derniers, les contrats d'assurance santé et de prévoyance ne couvrent pas les blessures causées lors de mouvements populaires ou d'émeutes. Se pose de nouveau le problème de l'assurabilité de ce type d'événements.

Manifestations illégales donc non couvertes par les assurances

Près de 2 000 Gilets Jaunes auraient été blessés lors des manifestations hebdomadaires orchestrées depuis mi-novembre et plus d'une centaine souffriraient de blessures graves (mains arrachées, oeil perdu, plaies diverses, fracture de la mâchoire...). C'est la conséquence inattendue pour une grande partie d'entre eux : leur mutuelle refuse de les indemniser. Les grands quotidiens se font l'écho de Gilets Jaunes grièvement blessés confrontés au refus de prise en charge de leurs frais de santé par leur complémentaire, quand d'autres découvrent que leur contrat de prévoyance ne prévoit pas d'indemnisation en cas d'invalidité.

En cause, une clause stipulant l'exclusion des sinistres résultant des mouvements populaires ou d'émeutes. Même si la participation à une manifestation non déclarée, comme sont souvent les manifestations de Gilets Jaunes, n'est pas une infraction et ne peut être considérée comme illégale tant qu'elle n'est pas interdite par arrêté préfectoral, les compagnies d'assurance les assimilent à des manifestations illégales, daignant ainsi toute couverture des sinistres occasionnés. Quasiment tous les contrats de prévoyance excluent des garanties les blessures causées lors de violences urbaines, de mouvements populaires ou d'émeutes.

Assurabilité des mouvements populaires

En France, le droit de manifester est inscrit dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. C'est donc logiquement qu'il appartient à l'Etat ou à la collectivité de réparer les dommages résultant de ces manifestations. Dans les faits, l'indemnisation des pertes et des dommages a peu à peu glissé vers la société civile. La loi de 1986 a rendu obligatoire la garantie des dommages ayant pour origine un acte de terrorisme ou un attentat dans le cadre de toute souscription d’un contrat d’assurance, mais elle n'a rien modifié dans les cas des émeutes et des mouvements populaires. Les assureurs ont gardé la liberté contractuelle de couvrir les sinistres occasionnés par ce type d'évènements avec une possibilité de recours à l'encontre des pouvoirs publics. 

Ni les textes de loi ni la jurisprudence ne définissent clairement les Grèves, Emeutes et Mouvements Populaires (GEMP), qui constituent pour les assureurs des risques atypiques compte tenu de leur caractère imprévisible rendant impossible toute modélisation. Les GEMP sont par ailleurs des risques émergents, car associés au développement des outils de communication instantanée (smartphone, internet, réseaux sociaux). Chez Axa, on identifie les GEMP comme les risques qui auront le plus fort impact sur la société dans les 5 et 10 prochaines années, derrière les risques économiques et financiers. En France, l'exclusion du risque GEMP par les contrats d'assurance est donc la règle. Devant les lacunes du contexte juridique, il est primordial que les polices d'assurance et leur couverture en réassurance précisent ce qui est couvert et dans quelle limite, afin de pouvoir garantir les termes du contrat le moment venu.

Par , le mardi 29 janvier 2019