Réforme 100% Santé : pas d'engagement des organismes complémentaires sur les augmentations de tarifs

Le reste à charge zéro en optique, dentaire et en audiologie crée de fortes tensions au sein des organismes complémentaires. À l'origine de la polémique, une étude alarmiste et largement médiatisée du courtier Santiane sur l'impact du RAC 0 sur les tarifs des Ocam. À ce jour, aucun engagement n'a été pris concernant la répercussion de la réforme sur les cotisations.

Près de 10% de hausse pour les contrats seniors

Le 23 octobre, Santiane rendait public une étude sur l'impact financier de la réforme 100% Santé, qui prévoit un reste à charge zéro en optique, dentaire et audiologie. Sur la base d'un échantillon de 100 000 assurés, le courtier évaluait à 7% la hausse moyenne des cotisations d'ici 2021, date où la réforme sera achevée. L'augmentation grimpe à 9,5% pour les seniors de plus de 60 ans. Toujours selon le courtier, les organismes complémentaires ne pourront absorber les coûts de la réforme, et devront mécaniquement les répercuter sur leurs clients. Un discours alarmiste repris copieusement par les chaînes d'infos et qui va à l'encontre de l'argumentaire du gouvernement.

Le jour même, la ministre de la Santé Agnès Buzyn rappelait que "cette réforme est prise en charge aux trois-quarts par la Sécurité Sociale et seulement un quart par les complémentaires santé", demandant aux organismes assureurs de respecter leurs engagements : le coût de cette réforme va être absorbée par l'augmentation naturelle des coûts des complémentaires. Le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux fut plus pragmatique, invitant les mutuelles "à respecter l'engagement pris avec l’État, faute de quoi le gouvernement prendrait ses responsabilités". La menace de mesures coercitives n'est pas du goût des complémentaires.

Trop tôt pour mesurer l'impact du RAC 0

Selon Maurice Ronat, président de l'Unocam (Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire), il n'y a jamais eu d'engagement à ne pas augmenter les cotisations. L'engagement non formel porte uniquement sur une répercussion des hausses de cotisations la plus modérée possible. Le seul accord écrit des Ocam concerne la mise en œuvre de la réforme en dentaire. Pour le RAC 0 en optique et audiologie, aucun accord tripartite n'a été conclu (Assurance Maladie, organismes complémentaires et syndicats de médecins).

Thierry Baudet, président de la Fédération nationale de la Mutualité Française (FNMF), tout comme Bernard Spitz, président de la Fédération Française de l'Assurance (FFA), critiquent l'emballement excessif généré par l'étude de Santiane. Le coût final du RAC 0 dépendra de multiples facteurs, son impact sur les cotisations ne peut aujourd'hui être apprécié. Selon la Mutualité Française, les dépenses supplémentaires pour rembourser les prothèses dentaires et auditives pourraient être en partie compensées par une maitrise des coûts en optique. Tout dépendra de la spécificité des adhérents et de leur complémentaire (individuelle ou collective). Sans toutefois omettre que l'impact pourrait être plus fort pour les seniors et pour les assurés couverts par des contrats d'entrée de gamme (garanties inférieures au panier de soins du RAC 0). Pour ces derniers, la mise à niveau des contrats de base pourrait entraîner une hausse des cotisations de 4% à 5% étalée sur trois années. La Mutualité a proposé la mise en place d'un comité de suivi de la réforme ce que la ministre de la Santé a accepté.

Améliorer la lisibilité des garanties

Il est un point sur lequel les assureurs se sont fermement engagés : la lisibilité des contrats. D'ici la fin de l'année, les discussions entre l'Unocam et le CCSF (Comité Consultatif du Secteur Financier) devraient permettre la mise en place d'un dispositif visant à améliorer la compréhension par les assurés des garanties proposées par chaque complémentaire. Le CCSF est favorable à une présentation harmonisée des cinq grands postes de remboursement (soins courants, hospitalisation, dentaire, optique et prothèses auditives), agrémentée d'une douzaine d'exemples chiffrés de prise en charge communs à l'ensemble des contrats afin que les assurés puissent comparer objectivement. Le CCSF demande d'aller plus loin avec la rédaction d'un glossaire commun à l'ensemble des acteurs de l'assurance santé et se prononce même en faveur d'un caractère contraignant des propositions faites dans le cadre de l'amélioration de la lisibilité des contrats.






Par , le vendredi 16 novembre 2018